Non, il n’est pas question ici de vous raconter comment j’ai obtenu mes super-pouvoirs de gamer journaliste. Peut-être avec un brin de narcissisme je me suis dit qu’évoquer ma carrière fort longue pourrait être intéressant pour balayer en quelques articles l’histoire du jeu vidéo tel que je l’ai vécu en un peu plus d’un quart de siècle à écumer, éditeurs, rédactions, salons, etc. Alors commençons par le commencement.
Comme tout gamin des années 70, j’ai grandi avec des jouets classiques, les voitures miniatures que je faisais rouler sur toutes surfaces au grand dam de mes parents qui en avaient marre de voir des traces partout sur les meubles et les murs. Mais à la fin des années 70 et tout début des années 80, j’ai découvert le jeu électronique. En premier cela fut les flippers dont mon père était friand. On partait en famille se faire des parties. C’était un peu une sortie assez spéciale là où d’autres familles allaient se balader dans les parcs. Cette pratique a duré pendant des années. Mais à côté de ces flippers, je voyais de drôles d’appareils avec une télé. Curieux, j’essayais tant bien que mal d’y accéder et de voir ce qu’il en était. Avec mon frère, on découvrait alors les jeux d’arcade et cela lors de vacances en Espagne alors qu’on retournait voir de la famille à Madrid.
Ah ces premières parties sur des jeux tels que Defender ou encore Asteroids (je n’aimais pas Breakout ni Pong mais évidemment qu’ils étaient de la partie) sur des machines trop hautes pour nous. Le taulier, nous connaissant, nous mettait gentiment sur des tabourets pour qu’on puisse voir l’écran et tripoter les sticks. Tout d’abord, la majorité des bornes étaient avec des écrans monochromes. Beaucoup de jeunes de maintenant trouverait sans doute ces jeux insipides mais pour le gamin que j’étais, c’était merveilleux de voir un truc à l’écran bouger selon mes désirs. Moi qui était fan de voitures (vous savez ces miniatures), je découvrais un jeu de course en vue aérienne avec des tracés bien tordus (impossible de me souvenir du titre de ce jeu malheureusement) et avec un volant. Un vrai volant que j’avais le droit de tourner à ma guise contrairement à celui de la voiture de mon papa. Ce titre est pour sûr l’un des ancêtres d’un titre comme SuperSprint et de nos Forza et Gran Turismo modernes.
Année après année, on voyait l’évolution des bornes d’arcade avec des jeux de plus en plus riches et des réalisations de plus en plus colorées et crédibles loin de l’aspect schématique des premiers titres. Jusqu’au milieu des années 80, on passait donc nos étés à écumer toutes les salles d’arcade, nombreuses au demeurant et non interdites aux moins de 18 ans comme c’était le cas en France, à Madrid à tester des jeux comme Spy Hunter, Punch Out, Scramble, Kung Fu Master, Gyruss et flopée de shoot’em ups et de beat’em all. La liste serait bien trop longue mais pensez à tous les grands classiques et il y a de fortes chances qu’on n’y ait joué en tant que contemporain.
Pour moi, le jeu vidéo a été pendant des années synonyme de salle d’arcade. Avoir cela à la maison? Même pas en rêve. Pourtant je savais que des consoles existaient et que des amis à moi en avaient chez eux. Je les enviais même si je trouvais les jeux pas du même niveau qu’en arcade… évidemment. Je me souviens d’avoir passé des après-midi à jouer sur des consoles où les jeux étaient dans la mémoire de la console et où on tripotait des switchs pour passer d’un jeu à l’autre. Mais comme beaucoup d’anciens c’est l’Atari VCS 2600 qui m’aura le plus marqué. Et pourtant je ne l’ai jamais possédé personnellement.
L’un de mes meilleurs potes l’avait chez lui avec quelques jeux dont mon amour de gamin, Defender. C’est sur ce jeu dans sa version Atari VCS 2600 que j’ai découvert à quel point un joystick à l’ergonomie qu’on qualifierait de lamentable de nos jours pouvait blesser. Plutôt bon, je pouvais jouer près d’une heure avec une seule vie à m’en faire des ampoules et des crampes au pouce à presser sur ce satané bouton rouge du joystick d’Atari. Il fallait souffrir pour avoir du plaisir. Un brin maso quoi…
Mais aussi curieux que cela puisse vous paraître ce n’est pas le monde console qui est arrivé à la maison. C’est celui de la micro-informatique. En ce début des années 80, l’avènement de la micro-informatique a changé la donne. Tout d’un coup, les ordinateurs devenaient accessibles au tout un chacun avec des usages bien souvent « rêvés » et inspirés du monde professionnel. J’avais commencé à suivre ça dès mon entrée au collège et je me passionnais pour ces joujoux hors de prix avec lesquels j’imaginais passer des heures à bidouiller pour en faire sortir quelque chose. J’adorais alors me balader dans les magasins et regarder, toucher, les énormes PC de l’époque et surtout un certain Apple IIe, la machine de mes rêves.
Pourtant mes premières heures sur un ordinateur l’ont été sur une machine beaucoup plus modeste et qui ne m’appartenait pas, le Sinclair ZX81 avec son fameux clavier à membrane. Imaginez-vous taper des lignes de code sur un clavier pareil. C’était un calvaire. Le plus cocasse c’est que cet ordinateur n’avait que 1ko de mémoire. Oui, vous avez bien lu 1Ko. Et pourtant avec mon pote, on s’éclatait et on avait l’impression de découvrir le saint Graal lorsque le programme fonctionnait. Plus tard, ce même pote aura récupéré l’extension 16Ko pour des programmes plus poussés. Ca servait à quelque chose d’avoir un papa ingénieur en ce temps là pour avoir de l’électronique à la maison.
Chez moi, il aura fallu que peu de temps pour que mon père ne prenne conscience que l’informatique allait être primordial à l’avenir. Il décida de nous acheter un ordinateur pour que nous apprenions aussi tôt que possible. Mon frère et moi ne remercierons jamais assez notre père pour cette décision. Tous deux, nous faisions alors partie de cette très petite minorité quasi-marginale de gamins ayant un ordinateur à la maison. Vous vous dites sans doute que j’ai eu droit à l’Apple IIe n’est-ce pas? Hé ben non. Compte tenu du tarif guère approprié pour le budget de mes parents, j’ai opté pour le Commodore 64. Sans le savoir, mon choix allait changer bien des choses dans la trajectoire de ma vie.
Mais ça, c’est pour le prochain chapitre… 😉