Avec les sorties de Virtua Racing sur Switch et de Bloodstained (Castlevania officieux) sur la plupart des machines, il y a comme un vent de fraîcheur venu tout droit des 90‘s qui souffle en cet été caniculaire. Rafraîchissant. Mais ne découvrez pas vos gorges d’un fil pour autant, puisqu’une autre licence mythique de l’âge d’or des 16bit et de l’arcade ressurgit de nulle part ! Vous ne l’attendiez pas ? Nous non plus !
De mémoire, le petit monde de la baston avait été marqué au début des années 90 par les altercations répétées entre les poulains de chez Capcom et SNK. Si Street Fighter 2 s’est imposé comme l’un des titres majeurs de cette décennie, en face les Fatal Fury puis King of Fighters ne manquaient pas d’argument, surtout en terme de réalisation… du moins pour les heureux possesseurs de NeoGeo. Pas étonnant ! Développé à l’origine pour les bornes NeoGeo MVS, la transition se faisait alors en douceur vers la “Rolls des consoles”. En revanche, les portages destinés aux 16bit lambda (SNES, MD, MCD et autres…) effectués par Takara ont été bien plus chaotiques. Un peu à l’image de ce qui était arrivé à Art of Fighting et surtout Samurai Shodown. Cela n’a pas empêché la franchise Samurai Spirits/Samurai Shodown d’enfanter d’une bonne demi-douzaine d’épisodes officiels et de nombreux spin-off sortis entre 1993 et 2008 en arcade, sur NeoGeo, sur les machines (16bits et 32bits) de salon, sur PS2 et même sur Wii. Dans ce dernier ca, c’était à l’occasion d’une compilation. Et depuis ? La licence reprise par SNK PlayMore était un peu tombée dans l’oubli, elle nous revient plus en forme… et en volume que jamais grâce à SNK Corp. Oui Playmore est mort ! Pardonnez-moi cette rime !
Exit la 2D pixelisée des familles, cette cuvée 2019 de Samurai Shodown se dote d’un vrai moteur 3D. Aussi étonnant que cela puisse paraître c’est pourtant loin d’être une première dans l’histoire de la saga. On a tendance à l’oublier mais, la franchise avait déjà tenté la transition vers la troisième dimension dès 1997 par l’intermédiaire de la borne d’arcade HyperNeoGeo 64 et deux spin-off de Samurai Shodown tout de même. Cependant l’essai n’ayant pas été concluant, ces jeux n’ont jamais été adapté aux consoles de salon ou exporté hors des frontières de l’archipel nippon. Preuve que le passage à la 3D était prématuré, même le Samurai Shodown V paru en 2005 était encore en 2D. Carburant à l’Unreal Engine 4, cette cuvée 2019 de Samurai Spirits joue cette fois à armes égales avec une horde de compétiteurs survoltés. En plus de se retrouver confronté à Street Fighter V, le reboot des aventures de Haomaru et de ses “potes” doit aussi composer avec Mortal Kombat 11, Guilty Gear, SoulCalibur 6 et Tekken 7. Même en éliminant d’emblée les deux derniers concurrents, gameplay en 2D oblige, la baston reste sacrément enragée et une fois de plus un jeu de Capcom (et pas des moindres) se retrouve opposé à l’un des poulains de chez SNK. Ça va charcler ?
Inutile de tourner autour du pot, malgré ses trois ans d’âge, Street Fighter V pourrait infliger un méchant KO technique à Samurai Shodown du simple point de vue de la réalisation. En effet, les arrières plans de ce reboot manquent cruellement d’animations, on ne retrouve pas toujours dans ce jeu le souçis du détail, qui était pourtant la marque de fabrique des productions de chez SNK. De prime abord, le chara design déçoit aussi un peu, ainsi Haomaru – le samouraï à la tignasse hirsute – paraît moins fringuant que sur les artworks de l’époque. Mais, passée quelques heures de jeu, la plupart des seize bretteurs (treize vétérans de la série et trois nouveaux) de ce reboot de Samurai Shodown affichent autant voire plus de charisme encore que n’importe lequel des castagneurs du bourre pif de rue de Capcom. Le graphisme manque un peu de finesse sur Xbox One S, la faute à un léger aliasing et des textures pas forcément hyper détaillées au niveau des visages des combattant. Toutefois, ce titre a tout de même le mérite d’être assez joli, grâce à son rendu coloré et crayonné, et il compense le manque de générosité ou de vie de ses arrières plans, par des avalanches d’effets graphiques accompagnées de giclées d’hémoglobine à chaque coup porté. D’ailleurs, en ne désactivant pas le mode “gore”, on remarque que les combattants fringants en début de match se recouvrent de davantage de blessures et salissures à chaque coup reçu. Quant à l’animation, elle s’avère assez fluide – malgré quelques ralentissements volontaires à la Street Fighter 2, lorsqu’on porte un “Dragon Punch” à un adversaire – et elle offre des affrontements frénétiques. Vous voilà prévenu, Samurai Shodown ne séduit peut-être pas le quidam au premier coup d’oeil, il dévoile ses charmes un peu sur la durée, à l’image de sa prise en main.
Dans les grandes lignes, Samurai Shodown se joue toujours à la manière d’un Street Fighter 2 ou King of Fighters si vous êtes un fan de SNK. Comprenez par-là que les seize combattants peuvent asséner des coups de base à l’aide de leur armes (sabre, rapière, lance…) ou distribuer des coups de tatanes. En sus de ces attaques, ils peuvent bien sûr effectuer des attaques spéciales par l’exécution d’un enchaînement directionnel combiné à l’un des trois coups de poings (faible, moyen, fort). En bref Samurai Shodown perpétue la tradition des jeux de castagne de la NeoGeo en employant seulement quatre boutons d’action. Si l’amateur du genre va trouver rapidement ses marques en enchaînant Dragon punch et autres projections énergétiques avec maestria, le gameplay de ce jeu est en vérité bien plus profond qu’il n’y paraît. Certes on aurait aimé des combats aériens et virevoltants à la manière d’un BlazBlue ou Guilty Gear, mais cela n’empêche pas la dernière production de SNK d’être à la fois nerveuse et aussi un brin technique. En appuyant au bon moment sur la touche de garde (arrière), on peut parer le coup, un peu à la manière d’un Street Fighter 3. Pas évidente à caser, cette garde permet d’engranger davantage d’énergie dans la jauge de furie sans encaisser le moindre dégât. D’ailleurs, lorsqu’elle est suffisamment remplie, la barre de rage prodigue momentanément plus de puissance aux attaques de base et attaques spéciales, elle offre aussi d’employer une super attaque spéciale dévastatrice, de désarmer l’adversaire ou de sacrifier la jauge de furie en échange d’une attaque imparable, qui vampirise plus du tiers de barre de vitalité de l’opposant. Le jeu regorge de pas mal de subtilités, inutile d’éplucher les aides de jeu en ligne, il offre un tutorial qui décompose assez bien chaque aspect du jeu à maîtriser.
Achevons ce tour d’horizon en parlant pour une fois des différents modes de jeu. Ce Samurai Shodown propose pléthore d’activité pour s’amuser en solitaire comme en multi. Citons d’abord le tutorial évoqué précédemment, il contient aussi un entraînement qui propose de mettre en pratique les connaissances théoriques. Destiné à être aussi pratiqué en solo il y a le mode Story (qui aurait pu être rebaptisé arcade) dans lequel on affronte une huitaine d’adversaires, un mode survie où l’on doit survivre aux confrontations contre les fantômes (10, 50 à 100) de joueurs, un solo en contre la montre, un second mode survie où l’on combat des bots contrôlés par l’IA, un pseudo mode arcade où l’on doit terrasser les seize combattants du jeu et enfin un mode versus (contre l’ordi ou un joueur sur le même écran). Précisons que Samurai Shodown peut bien sûr être pratiqué en ligne à l’occasion d’un mode online où l’on affronte les joueurs pour le fun ou la gloire lors de matchs non classés ou classés. En parallèle de ces modes de jeu, le menu principal permet aussi d’accéder aux sound test, pour écouter les jolies mélodies de jeu, et revoir les cinématiques des personnages débloquées lors du mode story. Enfin, notez qu’un contenu téléchargeable est naturellement en préparation et qu’il devrait livrer quatre personnages supplémentaires. C’est vrai qu’avec ses seize personnages jouables, hors DLC, Samurai Shodown fait un peu le service minimum en livrant autant de combattants que Street Fighter V à sa sortie. Décidément SNK n’a pas fini de s’inspirer des productions de chez Capcom. Voilà qui devrait relancer la compétition entre les géants de la baston et c’est tant mieux !