Enfilez votre chemise à carreaux de bûcheron et le vieux blue jean des familles, direction Seattle ! Entre coups de foudres, ménage à trois, horreur et rififi préparez-vous à quelques nuits blanches avec une aventure plus gore et violente que jamais !
Savez-vous quel est le point commun entre Last of Us et sa suite (à part le titre bien sûr) ? Le premier opus est sorti en toute fin de vie de la PS3, et, Ô surprise, ce second volet débarque aussi lors du dernier été de la PS4 ! Voilà que résonne déjà le chant du cygne pour le monolithe noir de Sony ? Pas vraiment ! Les inconditionnels de la PlayStation4 peuvent se rassurer, le catalogue de leur console préféré devrait continuer à accueillir de nouveaux titres l’espace de quelques trimestres encore. Mais disons qu’elle ne sera plus LA reine de beauté de chez Sony en cette fin d’année. Depuis 2013 les développements chez Naughty Dog se sont un peu éternisés et les titres originaux se comptent sur les doigts d’une seule main. Ainsi lorsque l’on met de côté les remakes HD des Jak & Dexter et des Uncharted et même de The Last of Us premier du nom, seuls deux jeux ont été ”exclusifs” à la PS4 : Uncharted 4 et The Last of Us Part II. Avouez que c’est assez léger de la part d’un studio qui s’est montré plus “créatif” et inspiré sur PlayStation3 ! Et si nous débutions le tour du propriétaire par un petit rappel du pitch de The Last of Us Part II ?
Autrefois protégé par Joel, son paternel barbu de substitution, notre héroïne émancipée s’embarque cette fois dans une traque vengeresse qui la mène des confins enneigés du Wyoming jusqu’aux rivages de la Côte Pacifique. N’allez pas imaginer que cette nouvelle épopée qui se déroule cinq ans après les événements du premier volet rivalise en poésie. Ici pas question de s’attarder sur l’intégralité du périple à travers le Middle West au fil des saisons. Le jeu nous offre à la place une ellipse narrative pour nous transporter directement dans la jungle urbaine, d’une ville dévastée. Et laissée à l’abandon ? Eh bien pas vraiment ! En sus de devoir survivre aux hordes d’infectés qui pullulent dans l’obscurité des édifices délabrés, Ellie et sa nouvelle acolyte, Dina, sont aussi confrontés à des patrouilles de survivants armés jusqu’aux dents. Deux factions se disputent le contrôle de cette contrée inhospitalière berceau de la musique Grunge. D’un côté on a les Séraphistes ou Scars (des fanatiques religieux pas très pacifistes) et de l’autre les WLF – prononcez Wolf – des survivants qui semblent avoir un contentieux avec Joel. Concrètement, passé des séquences de mises en jambes dans les peaux de Ellie et Abby (son antagoniste), on se retrouve à incarner les deux “héroïnes” à l’occasion de six chapitres et niveaux prologues qui tentent de nous maintenir en haleine pendant près d’une vingtaine d’heures. Enfin presque. Histoire de délayer davantage la sauce, on se retrouve à revivre de nombreux flashbacks, qui plombent sans cesse le rythme d’une épopée déjà lente et trop redondante. Une explication des raisons de la colère pas bien motivante.
Côté gameplay effacez donc vos espoirs d’open world, The Last of Us Part II reste une aventure linéaire et en trompe l’oeil ! Comprenez que l’on se borne à crapahuter parfois sur de grandes distances à travers des corridors larges mais balisés vers des lieux un peu plus ouverts généralement propices aux affrontements. Et ainsi de suite. Dans les environnements destinés aux gunfights on peut éviter les rixes en jouant la carte de la furtivité en passant par l’intérieur des édifices, décimer les ennemis à l’aide d’un arsenal constitué de flingues et de pétoires, installer des pièges ou – hélas plus rarement – pousser les factions de survivants et les infectés à s’entretuer. Notez que si l’armement employé par Abby ou Ellie diffère (la première utilise par exemple une arbalète, l’autre un arc), il en est aussi de même au niveau des gadgets qu’il est possible de confectionner à l’aide d’éléments disséminés dans l’environnement ou sur les cadavres des ennemis. À l’instar du premier volet on peut aussi fabriquer des items revigorants, des armes blanches comme des surins afin de tuer les ennemis au corps à corps, voire aussi des pièges explosifs, cocktails Molotov, flèches et munitions spéciales (cartouches de fusil à pompe incendiaires). Les munitions disséminées dans l’environnement ou sur les corps encore fumants des adversaires ne permettent malheureusement pas de faire feu de tout bois et de foncer bille en tête. À la place, il faut faire profil bas en évoluant à couvert parmi les hautes herbes face à une escouade de survivants ou d’avancer prudemment en silence dans l’obscurité lorsqu’on se retrouve confronté à des infectés.
En termes de jouabilité et prise en main, le jeu ne trahit pas son prédécesseur, et il se montre d’ailleurs toujours aussi impitoyable. Il sanctionne ainsi d’une mise à mort immédiate l’héroïne qui cherche à prendre la poudre d’escampette par une séquence cinématique gore et sanglante. Mieux vaut avoir le cœur bien accroché pour ne pas rendre son dernier repas sur la moquette du salon en cas de mort répétées. Lors d’un combat face à un boss, l’infecté met nos nerfs à vif. Le bougre parvient à encaisser sans trop sourciller des tirs de lance-flammes, des explosions de grenade sans broncher, il défonce les murs et il nous oblige à esquiver ses attaques – et celles de ses alliés – tout en restant hors de portée des émanations toxiques qu’il dégage. Oui. The Last of Us Part II est un jeu exigeant. Lors des gunfights par exemple, en sus de devoir composer avec des munitions disponibles en quantité limités, on doit aussi survivre à une IA assez vicelarde. Les survivants qui ne parviennent pas à nous toucher ne campent bêtement pas sur leurs positions. Lorsque l’on reste planqué derrière un abri, ils n’hésitent pas à contourner nos défenses afin de nous prendre à revers. S’il faut garder l’oeil ouvert, il est aussi impératif de tendre l’oreille et utiliser les capacités auditives de notre héroïne pour déterminer la position des ennemis ou suivre leurs déplacements à travers les murs. Notez que s’il mélange assez brillamment l’action à l’infiltration, on regrette en revanche l’aspect trop monolitique de certains éléments du décor. Contrairement à un vieux Splinter Cell vieux de dix-huit ans le titre ne permet pas d’endommager les lumières pour échapper à la vigilence des survivants. Etonnant non ?
Ce Survival Horror pur jus offre un challenge digne de ce nom aux plus survivalistes des joueurs. Mais dans le même temps, il dégaine la carte de l’accessibilité pour permettre à de nouveaux aventuriers de s’essayer à cette seconde épopée par le biais d’une kyrielle “d’aides” sonores ou visuelles. Si beaucoup de jeux (notamment des FPS) ont déjà proposé des variations de palettes pour accroître le confort de jeu des “daltoniens”, The Last of Us 2 va plus loin en offrant par exemple aux malvoyants des éléments visuels teintés d’une couleur unie afin de distinguer les ennemis, alliés et éléments interactifs. Les environnements perdent aussi en détail, et sont colorés d’une teinte terne afin de gagner en lisibilité. Le jeu offre aussi des indicateurs sonores lorsque l’on va dans la bonne direction ou que l’on s’approche d’un point d’intérêt. Le nouveau titre de Naughty Dog est également flanqué de nombreuses autres aides qui permettent par exemple d’indiquer la bonne direction à suivre, de simplifier la visée lors des gunfights en ralentissant l’action, de diminuer la perception des ennemis. Tous ces réglages se font par l’intermédiaire du niveau de difficulté, qui permet vraiment de moduler l’expérience The Last of Us Part II à sa convenance. Un très bon point.
Côté réalisation on ne jugera naturellement pas TLAOU2 sur l’extrême laideur de son rendu simplifié qui semble nous renvoyer aux heures sombres des productions les plus douteuses de la PlayStation2. Le moteur cousu main pour la PlayStation4, affiche des textures en haute définition et environnements extrêmement détaillés aux effets d’éclairage chatoyants. Fin du fin, le jeu -“de base” splendide – utilise à outrance un antialiasing qui supprime les effets d’escalier si disgracieux sur les bords des polygones et textures et tourne de manière fluide malgré tout. Si les modélisations de certains protagonistes ne transpirent pas le charisme par tous les pores de la peau, en revanche on ne peut qu’admirer le boulot qui a été effectué au niveau des animations des protagonistes, des antagonistes et même des canassons. Ellie ou Abby se déplacent avec une certaine grâce et de manière assez organique à travers l’environnement. Comprenez qu’elles ne restent pas raides comme des piquets. Quant aux ennemis, ils voient leurs frimousse ou trogne sévèrement endommagées en cas de tir au visage. En sus d’en mettre plein les yeux, le jeu offre des temps de chargements assez rapides voire inexistants lorsqu’on crapahute à travers les levels et n’inflige pas de temps morts… contrairement à son scénario qui exaspère par ses moments de flottement. Techniquement, sans surprise pour un jeu First Party de chez Sony, le titre parvient à bien exploiter les capacités de notre bonne vieille PS4 arrivée en bout de course sans pour autant atteindre la perfection. En plus de quelques problèmes de caméra, en cours de partie des scripts de déplacement ont parfois déraillés, des ennemis sur le ferry échoué ont “spawné” à quelques mètres de nous. Et si les séances de plateformes nous ont exaspéré par leur extrême rigidité, rien ne nous a préparé à voir notre héroïne passer à travers la map après s’être réceptionné d’un saut. Peut-être s’agissait-il d’une vision de l’enfer ? Signalons enfin que si le titre propose quelques aides sonores bienvenues, le jeu bénéficie d’une bande-son parfois assez entraînante aux bass bien flipantes et d’effets sonores bigrement réussis et immersifs. Le mieux ? Le jeu est intégralement en français, dans les textes comme dans les menus, et il profite de doublages, qui sont les plus souvent très soignés. Techniquement, le jeu ne frôle pas ni tutoie la perfection, mais quelques-uns de ses problèmes les plus irritants seront sans doute corrigés lors des prochaines mises à jour.