Le dernier né de chez Avalanche Studios en met plein la gueule par son cocktail assez bien dosé d’exploration et d’action explosive et survoltée. Un bon point ! Encore faut-il marquer les esprits !
Presque dix ans après la sortie du premier volet, on pensait légitimement la franchise Rage tombée dans l’oubli. La dernière production originale des géniteurs des franchises Doom et Quake n’avait pas été aussi révolutionnaire que ses glorieux prédécesseurs… sans être un méchant pétard mouillé pour autant ! Alors, à l’annonce de la mise en chantier d’une suite, on croyait qu’id Software allait remonter les manches et sortir l’artillerie lourde, avant de découvrir que le bébé avait été délégué aux suédois d’Avalanche. Un studio passé maître dans la réalisation de jeux en mondes ouverts, à l’action détonante et motorisée comme Just Cause et Mad Max. Une alchimie alléchante, pourvu que l’exécution soit réussie.
En 2010, notre société frémissait déjà à l’idée d’une apocalypse annoncée pour 2012. Respirons un bon coup. La funeste prophétie n’a jamais eu lieu, notre bonne vieille Terre tourne toujours ! Toutefois dans le monde de Rage 2, l’humanité se remet à peine de la collision de l’astéroïde Apophis avec la planète bleue. Une bonne centaine d’années après le cataclysme – et quelques dizaines d’années après les événements du premier volet – des poches de civilisation subsistent dans une autarcie décadente, des gangs motorisés sèment la terreur sur les routes poussiéreuses, des hordes de mutants difformes grouillent dans les environnements abandonnés et l’Autorité tente d’écraser l’humanité avec ses troupes cybernétiques. Le coopératif a beau avoir le vent en poupe (Destiny, The Division, Anthem pour citer les plus connus), Avalanche Studios livre une aventure destinée à être pratiquée exclusivement en solo. Rage 2 offre d’arpenter les paysages post-apocalyptiques et de survivre aux dangers en faisant feu de tout bois tout en accomplissant des quêtes pour le compte de trois “factions”. Il flotte dans l’air comme une étrange sensation de déjà vu…
Si vous êtes un habitué des productions de Bethesda, et notamment de Fallout, alors sachez que Rage 2 est un peu le petit frère terrible de cette licence. Se déroulant lui aussi dans un monde ouvert post-apocalyptique, il met cependant de côté les PNJ trop bavards, il envoie valdinguer les choix cornéliens afin de faire la part belle à l’action débridée. Vu qu’on avait touché les profondeurs abyssales vidéoludiques avec Fallout 76 – au regard du glorieux passé de la franchise – l’année dernière, cette cuvée 2019 de Rage pouvait difficilement faire pire. Effacez vos inquiétudes. Malgré le passage de relais entre id Software et Avalanche Studios cette “co-production” américano-suédoise est fidèle au matériau d’origine. A l’instar du premier opus, elle alterne l’exploration de vastes étendues désertiques et les gunfights enragés à des barrages routiers à l’air libre ou dans des bâtiments ou structures souterraines. Lors des phases de FPS le héros, Walker – ranger de son état, mais pas originaire du Texas 😉 – peut recourir à des armes, items curateurs et compétences spéciales pour survivre à des confrontations plutôt intenses. Durant ces dernières les ennemis peuvent soit camper sur leurs positions ou venir en nombre au contact pour nous déloger d’un abri à grands renforts de mignardises détonantes : Les fourbes ! Heureusement on peut employer différentes compétences comme l’esquive pour se sortir des situations explosives ou recourir à une jauge de furie pour bénéficier d’un court “bullet time” durant lequel notre arme inflige des tirs dévastateurs et régénère notre vitalité. On peut aussi compter, dans une moindre mesure, sur le comportement parfois erratique des bots idiots contrôlés par l’IA (boss gelé sur place, ennemis coincés dans ou par un élément du décor…) pour se sortir des affrontements armés. Si les munitions peuvent venir à manquer dans le feu de l’action, notez qu’il est en sus impossible d’employer les pétoires et sulfateuses adverse comme dans la plupart des FPS modernes. A l’instar d’un vieux Doom, Rage 2 oblige à se contenter d’armes dégotées au fil de l’aventure (ici dans des arches) pour étoffer son arsenal. Les rares PNJ marchands que l’on est amené à croiser dans les villes ou sur les routes se contentent de vendre des consommables, des mods d’améliorations pour l’armement et les véhicules, ou de racheter la précieuse camelote glanée au fil de l’aventure. Les étendues du Wasteland sont constituées d’environnements inhospitaliers (bayou, canyons, déserts…) que l’on a évidemment “plaisir” à sillonner pied au plancher à bord d’une multitude d’engins motorisés équipés pour certains de sulfateuses dévastatrices. Pas vraiment utiles lors des prises d’assauts de places fortes adverses ou de rencontres avec des tours de surveillance de l’Autorité, les engins armés s’avèrent en revanche bien pratique pour attaquer les convois qui s’aventurent sur les routes tortueuses et accidentées. Quant aux engins dépourvus de sulfateuses, ils brillent lors des compétitions automobiles par leur sportivité et nervosité en fonçant à toute vibure sur des circuits aux tracés chaotiques. Sympathique.
Achevons comme souvent le tour du propriétaire en abordant la réalisation. Rage – premier du nom – avait bénéficié d’un moteur cousu main par John Carmack et les gens d’id Software. Rage 2 recycle quant à lui le moteur graphique Apex mis au point par Avalanche. De mémoire, le design s’avère assez fidèle au premier opus et ce malgré une palette de couleurs sporadiquement flashy. On retrouve dans la suite, le même genre d’endroits rouillés, déliquescents, sales et inhospitaliers, quant au chara-design des principaux protagonistes et antagonistes, il est tout aussi “amoché” mais hélas pas toujours inspiré. Gros regret concernant les quelques villes qu’on est amenés à visiter, elles manquent cruellement de vie et les PNJ ne se bousculent pas dans des environnements assez désertés… donc. Techniquement, le jeu est assez joli, comprenez par là qu’il colle assez bien aux exigences de qualité d’un jeu de 2019. Lors des phases en vue subjective, Rage 2 exhibe des environnements détaillés (aux textures pas d’une grande finesse certes), pendant que les virées en bagnoles à travers le Wasteland offrent une distance de visibilité appréciable sur les environs. Testé sur Xbox One S, le jeu s’est avéré être assez jouable lors des phases de FPS malgré une étrange sensation de manque de fluidité durant les rixes. En revanche, à l’occasion de certaines séquences d’exploration motorisés, l’animation n’était clairement pas à la fête. Un peu dommage ! Les possesseurs de Xbox One X devraient avoir un jeu plus agréable. Sur PS4 Pro, testé par Michel, Rage 2 tourne bien. Pour ces deux machines, Avalanche Studios a préféré privilégier le 1080p60. Vous vouliez du 4K, dommage pour vous.
Le jeu nous a aussi infligé un bug sonore assez gênant qui passait en boucle le son d’un tir de mitrailleuse, même après avoir rechargé la partie. En relançant Rage 2 la boucle sonore avait heureusement disparue. D’ailleurs, on se permet un petit coup de gueule concernant la gestion des sauvegardes. S’il consigne la progression automatiquement par checkpoint, le jeu offre aussi de sauvegarder la partie à volonté. Malheureusement lorsqu’on a l’audace de vouloir sauvegarder lors de l’assaut d’un bâtiment, il faut alors reprendre la partie depuis un point de contrôle situé en amont de la rixe. Voilà qui est rageant et aussi lourdingue… un peu à l’image de la maniabilité qui manque cruellement d’intuitivité ! Plutôt que de nous permettre de grimper à une échelle ou de ramasser un item dès que l’on s’en approche assez, le jeu oblige à presser une touche du pad afin d’interagir avec l’environnement. Pas très intuitif tout ça ! Loin d’être inoubliable, la bande-son de Rage 2 a le mérite de plutôt bien coller à l’action en faisant vibrer nos cages à miel avec des bon gros morceaux de Metal ou de techno industriel. Signalons enfin que le jeu est intégralement en français, aussi bien aux niveaux des textes que ceux des voix… mais qu’importe ! Vous serez-sans doute parfois trop occupés à survivre à l’horreur du Wasteland pour le remarquer !