Il court, il saute, il crache, presque trente ans après ses premiers exploits l’infatigable macaque reprend du service sur Switch pour le plaisir des vieux joueurs… comme des plus jeunes. Une bonne surprise !
Sorti à l’origine en borne d’arcade en 1989, Toki (connu sous le titre de Juju Densetsu au Japon) a fait l’objet de nombreuses conversions parues sur les consoles et les ordinateurs. Mais l’histoire a surtout gardé en mémoire les adaptations parues en 1991 sur Amiga et Atari ST. Deux moutures micro d’excellentes factures car les plus proches de l‘arcade, qui avaient en commun d’être déjà développées par le géniteur de cette mouture 2018 de Toki. Si entre temps, Philippe Dessoly a fait une infidélité au singe en créant Mr Nutz (héros d’un jeu de plateforme du même nom) avec ses compères Pierre Adane et Raphaël Gesqua, l’idée de ressusciter Toki lui trottait depuis très longtemps dans la tête. Il suffit de voir les vidéos datant de 2012. L’attente aura été bien trop longue. Six ans plus tard l’éditeur Microïds et le trio de Mr Nutz livrent enfin un… remake de Toki.
Si le fait d’incarner un singe cracheur de boules de feu a de quoi faire sourire les plus jeunes, comme ma fille de 7 ans, très vite on se (re)laisse prendre au jeu. Il propose de sauver la promise de Toki (ou Juju), la Princesse Miho, des doigts griffus de son horrible sorcier de tonton. Le principe n’a pas bougé d’un iota ! Lors de cette épopée, il faut survivre à une demi-douzaine de niveaux exotiques (cavernes, jungle, mer de glace…) bourrés à craquer d’ennemis et de toutes sortes de pièges et exécuter des sauts millimétrés sur des plateformes mouvantes ou destructibles. Des ingrédients classiques comme on en retrouve dans la plupart des jeux de plateformes de l’époque, mais Toki par sa difficulté, a la particularité de mettre la barre assez haut ! Il impose de connaître les différents niveaux par cœur afin d’anticiper les actions scriptées des ennemis, qui assaillent notre héros de manière quasi-simultanée laissant peu de temps pour réagir. Gare le moindre contact avec un ennemi ou un projectile renvoie le macaque à ses glorieux ancêtres et oblige à recommencer le stage depuis un point de sauvegarde situé légèrement en amont du lieu de trépas. Pour repousser les assaillant, le héros peut leur sauter sur la tête ou rester à distance en leur crachant différentes sortes de boules de feu au visage, obtenues via des power-up temporaires. Le niveau passé, l’imposant boss de fin de stage vaincu, ne comptez pas sur une éventuelle sauvegarde pour consigner votre progression et remettre à plus tard le sauvetage de Miho. En effet, ce jeu de plateforme à l’ancienne oblige à reprendre l’aventure depuis le début. Normal ! Pouvant être achevé en moins d’une petite demi-heure, Toki compense sa faible durée de vie – taillée pour l’arcade – par une action non-stop et un challenge tout simplement dantesque ! Faute d’aides, et histoire de rester accessible, le titre permet de moduler le nombre de vies et continues en réserve en sélectionnant un mode de difficulté allant de facile à extrême. Êtes-vous prêts à en baver ?
Sur le fond, Toki n’a pas changé. Il s’agit toujours d’un jeu de plateforme exigeant et impitoyable. Sur la forme, il a troqué la faible palette de couleurs et les pixels carrés contre une réalisation cartoonesque. Un peu à l’image de ce que le studio Lizardcube avait fait l’an passé avec le remake de Wonderboy The Dragon’s Trap sur Switch. Si ce dernier offrait de switcher instantanément de la version originale vers la mouture remaniée, Toki lui ne s’encombre pas de telles fioritures et propose simplement le rendu affiné et coloré. Le héros tout comme le bestiaire profitent aussi d’animations bien décomposées et rigolotes. Mention spéciale pour le stage de la mer de glace où les ennemis se sont habillés pour faire face aux températures hivernales et conditions extrêmes. Les différents niveaux ont bien sûr profité de ce lifting, ils affichent parfois de jolis effets graphiques et ils se sont dotés d’arrières plans et décors bien plus détaillés. Visuellement réussi, ce remake de Toki bénéficie en sus de musiques réorchestrées absolument somptueuses. Un « Océan » de plaisir pour les cages à miel de ceux qui ont connu – comme moi – ce jeu sur Atari ST. Enfin côté maniabilité, si ce bon vieux Toki répond parfaitement aux sollicitations du stick ou de la pseudo croix-directionnelle du JoyCon, certaines de ses animations – comme avancer en étant baissé – nous laissent toujours trop exposées au tir venant du dessus. D’ailleurs on aurait aussi aimé l’ajout de nouvelles fonctions au niveau de la maniabilité comme un autofire ou la possibilité d’avancer en tirant. Mais sans doute cela aurait dénaturé de trop cette expérience qui se voulait la plus authentique possible. De côté-là, mission accomplie !