Si l’on salive déjà d’avance devant le futur Projet Judge ou encore à l’annonce du remake du troisième opus des aventures de Kazuma Kiryu, ce n’est toutefois pas un jeu de la franchise Yakuza qui passe aujourd’hui sur le grill. Et pourtant… le bougre en a sacrément l’allure et le goût ! Votre viande vous l’aimez saignante ? Nous aussi !
Octobre 1988, un mercredi d’automne banal pour un écolier se gavant de séries animées comme Dragon Ball et Les Chevaliers du Zodiaque et qui se prend une méchante claque en découvrant Ken le Survivant sur la télé 55cm du salon. Trente ans plus tard, les écrans sont devenus larges et plats, et ces oeuvres animées cultissimes n’ont rien perdu de leur superbe, d’ailleurs elles continuent de faire l’objet de suites et remakes mais aussi d’adaptations vidéo ludiques plus ou moins réussies. Adapté quasiment sur chaque génération de consoles au Japon (et même en arcade et pachinko), les jeux estampillés Hokuto No Ken/Fist of the North Star sortis officiellement par chez nous – hors Black Belt et Last Battle donc – se comptent sur les doigts d’une seule main. Voilà qui est rageant quand on connaît la popularité de la licence dans l‘archipel ! Après un sympathique Ken’s Rage et sa suite développés par Koei Tecmo et inspirés des Dynasty Warriors (sortis en 2010 et 2013 sur PS3/X360), la franchise Fist of the North Star exporte enfin un troisième titre vers l’Occident. Cette fois c’est Sega et le Ryu Ga Gotoku Studio (ou plutôt l’équipe B) qui sont aux commandes de cette production déjà sortie au Japon au printemps dernier. Il n’y a pas si longtemps donc !
L’histoire de Lost Paradise se déroule toujours dans un futur à la Mad Max où les temps comme les œufs sont durs ! Lancé sur les traces de Julia – sa promise disparue après son combat contre Shin – notre bon vieux Kenshiro tombe sur une oasis perdue au milieu du désert, une ville répondant aux doux nom de Eden et qui s’avère être tout sauf un paradis ! Sans doute à cause des merveilles qu’elle renferme à profusion, cette bourgade convoitée par différents gangs sert de point de ralliement aux hors -la-loi et aux mauvais garçons, qui sèment le trouble dans les rues. A l’instar de Kazuma Kiryu, notre héros doit corriger ces bandes de punks qui tentent de se mesurer à lui en employant des enchaînements de coups de poings et coups de savates fulgurants. Naturellement, notre « héritier des plus grands maîtres chinois » peut esquiver ou bloquer les attaques et il peut recourir aux techniques ancestrales du Hokuto (à pain, à viande…) pour leur fermer/leur exploser le clapet ad vitam. Lorsqu’on se retrouve opposé à des ennemis, le titre « bascule » alors en Beat Them Up, il délimite une petite aire de combat et impose d’éliminer les adversaires par des attaques au corps à corps. En effet, contrairement à Kiryu, Ken ne peut pas utiliser des éléments du décor en guise d’arme de fortune pour se défaire d’agaçants adversaires équipés de lance-flamme, de couteaux ou de lance. Comme dans d’autres jeux du genre, le bestiaire est constitué d’une galerie de méchants qui se distinguent par leur gabarits, leur résistance et arme de prédilection. Si quelques mandales suffisent à éliminer les ennemis les plus fluets, les plus costauds nécessitent en revanche d’être affaiblis pour être éliminés via les techniques imparables du Hokuto qui – bien exécutées lors de QTE – offrent de faire exploser les têtes et les corps. En cours de combat, Ken peut aussi recourir à différents items curateurs, utiliser des talismans pour déclencher des techniques secrètes dévastatrices ou regagner de l’énergie. En plus de calmer les ardeurs de la petite friture, Kenshiro doit aussi affronter à l’occasion de combats assez épiques des boss charismatiques comme des maîtres du Hokuto – tels Raoh et Jagi -, du Nanto et même un gigantesque mutant. Globalement, en mode normal, les combats ne sont pas bien compliqués. Il suffit d’avoir amélioré les compétences et caractéristiques du héros lors de la montée en niveau, afin d’augmenter la résistance et la puissance des coups et obtenir de nouvelles panoplies de coups et actions. Enfin mieux vaut avoir une tonne d’items guérisseurs dans l’inventaire avant de partir vaillamment à l’abattoir… ou plutôt au combat.
Malgré son univers post apocalyptique, Fist of the North Star Lost Paradise s’impose comme une copie-carbone de Yakuza puisqu’on retrouve bon nombres d’éléments incontournables des aventures de Kazuma Kiryu. Au niveau des mécaniques tout d’abord, les développeurs pris d’un flagrant excès de flemmardise ont repris l’ancien inventaire, « l’arbre » de compétences/talents et même la gestion des sauvegardes antédiluvienne par points fixes. En plus d’offrir des confrontations façon beat’em up à foison, il dote aussi son monde « ouvert » de quatre vingt quêtes secondaires et d’une kyrielle d’activités annexes. Si l’on peut se péter la panse au resto du coin ou enquiller les shots d’alcool de pneu, le titre permet aussi de jouer le barman d’un petit bar guindé ou le gérant de club à hôtesses afin d’arrondir ses fins de mois. Le dernier né du Ryu Ga Gotoku Studio offre aussi de s’adonner à un mini-jeu qui combine rythme et action, de claquer ses espèces sonnantes au casino du coin, de broyer des têtes de gladiateurs dans l’arène et même de s’adonner à des compétitions « automobiles »… loin d’être fun !
Comme Eden ne rivalise pas par son charme, ni par sa superficie avec Kamurocho, ce Fist of the North Star Lost Paradise impose en sus de s’aventurer dans d’autres recoins des terres désolées et mal famées qui environnent la ville. Pour cela, il faut se mettre aux commandes d’un buggy assez poussif, que l’on doit améliorer avec l’aide de Bart en participant à des courses et en récupérant des composants lors des escapades motorisées. Disons le d’emblée, ces phases en véhicules sont pénibles. En effet, le terrain de jeu à explorer pied au plancher est à la fois vide (peu de « villes » et structures) et franchement moche. Le titre impose aussi de composer avec une réserve d’essence limitée et l’accès à certaines zones est barré par des moyens peu convaincants. En somme ce monde ouvert d’un autre temps manque d’allure..
De par ses environnements monolithiques dépourvus d’interactions et son rendu graphique sans fioritures (comprenez sans filtre), Fist of the North Star Lost Paradise ne carbure clairement pas au Dragon Engine. Sous le sympathique enrobage cell shadé, on croit plutôt reconnaître le moteur graphique de Yakuza 0. Un moteur certes daté, mais qui est suffisamment adapté à l’affichage des immenses étendues désertiques lors des phases motorisées sans sourciller. Techniquement, ce jeu n’inflige clairement pas une baffe monumentale. Les décors « intra muros » sont certes détaillés, mais les environnements naturels manquent cruellement de soins. Les habitant d’Eden vêtus de guenilles qui arpentent les rues sont bien moins variés que ceux d’un Yakuza. Même remarque pour les gangs de punks. Ces méchants semblent tous sortis du même moule, du même costumier et on ressent un brin de lassitude à leur taper dessus à bras raccourcis tout au long du jeu. S’ils ne bénéficient pas de modélisations aussi soignées que celles de Ken et des autres protagonistes et antagonistes majeurs du jeu, le design des méchants respecte bien l’apparence des différentes hordes de bad guys vus (notamment) dans la série animée. Enfin côté sons et musiques, Lost Paradise s’est paré d’une bande son très rock et a doté son Kenshiro de la voix japonaise de Kazuma Kiryu. Évidemment sortie américaine oblige le titre propose des voix en anglais et impose bien sûr des sous titres dans la langue de Shakespear à nous autres petits français, qui avons été captivé par les aventures de Ken le Survivant. Dommage, on serait bien partis à la poursuite de Raoul à Montélimar !